L’essor des traitements GLP-1 : impacts et opportunités pour l’agroalimentaire
De l'usage médicamenteuse à des changements de consommations alimentaires profonds
Comment fonctionnent les GLP-1 ?
Les agonistes du GLP-1 (comme Ozempic ou Wegovy) sont des médicaments initialement conçus pour traiter le diabète de type 2.
Ils imitent une hormone intestinale naturelle (le GLP-1) qui régule la glycémie et ralentit la vidange de l’estomac, tout en stimulant la satiété et en réduisant l’appétit.
Résultat : les utilisateurs mangent moins, sans effort volontaire, car l’envie de manger diminue fortement.
Ce mécanisme rend ces traitements très efficaces pour la perte de poids mais il transforme aussi les comportements alimentaires au quotidien.
Une tendance mondiale, jusqu’en France
Les agonistes du GLP-1, initialement destinés aux diabétiques, sont devenus des médicaments amaigrissants phares. Leur utilisation explose à l’échelle mondiale.
Aux États-Unis, environ 1,7 % de la population était traitée par un semaglutide en 2023 (soit une multiplication par 40 en cinq ans).
D’après un sondage de 2024, 6 % des adultes américains déclarent même être sous traitement GLP-1.
Le marché anti-obésité associé pourrait atteindre 150 milliards de dollars au début des années 2030.
Cette vague touche aussi la France : la promotion d’Ozempic sur les réseaux sociaux y a entraîné un usage détourné, et les autorités évoquent des « fortes tensions d’approvisionnement ».
Depuis fin 2024, Wegovy (dose amaigrissante du semaglutide) est autorisé en France sous ordonnance par les médecins et nutritionnistes, sans remboursement public pour l’instant.
Un appétit réduit, de nouvelles habitudes de consommation
Ces traitements agissent comme coupe-faim, réduisant l’appétit jusqu’à 30 % de calories en moins par jour en moyenne.
Les personnes sous GLP-1 modifient leurs comportements alimentaires de façon marquée :
Moins de produits sucrés, gras, salés, ou d’alcool
Plus de protéines, de fruits et légumes, et d’hydratation
Des portions plus petites, des repas plus simples et fonctionnels
Des témoignages de consommateurs, que j'ai recueilli sur les réseaux sociaux, confirment cette tendance.
Claire, 38 ans, utilisatrice de Wegovy, explique : « Je n’ai plus envie de grignoter entre les repas. Avant, je craquais tous les soirs pour du chocolat ou des chips. Aujourd’hui, une petite portion me suffit et parfois, je l’oublie même. »
De son côté, Thomas, 44 ans, partage : « Je mange beaucoup plus lentement, et je me rends compte que je suis rassasié très vite. Je fais attention à la qualité de ce que je mange, car j’ai moins de place, donc autant que ce soit bon pour moi. »
Même discours chez Camille, 30 ans : « J’ai complètement arrêté les sodas. Ça ne me fait plus envie. Je bois plus d’eau, je cuisine davantage. C’est comme si mon cerveau avait reprogrammé mes envies. »
Ces changements profonds sont décrits par les professionnels de santé comme un “reset métabolique et comportemental”, qui transforme la relation au corps… mais aussi à la nourriture.
Produits sucrés et ultra-transformés sous pression
Une étude EY-Parthenon estime que l’essor du GLP-1 pourrait freiner de 12 milliards de dollars la croissance du marché des snacks sur dix ans.
Les enseignes exposées aux produits ultra-transformés ou très caloriques sont les plus vulnérables. Walmart observe déjà une baisse des volumes achetés chez certains clients sous traitement.
Ce n’est déjà plus une mode : c’est un changement durable de la demande.
Innover pour s’adapter : opportunités B2B
Certaines marques s’adaptent déjà.
Nestlé a lancé “Vital Pursuit” aux États-Unis, une gamme de plats surgelés GLP-1-friendly : portions contrôlées, riches en protéines et fibres, pensées pour un appétit réduit.
D’autres marques ajustent leurs formats, reformulent pour réduire les sucres, ou créent de nouveaux produits “satiétogènes”.
Le snacking santé, les boissons fonctionnelles ou les barres protéinées voient donc leur potentiel renforcé.
Pour les marques françaises, l’heure est à l’anticipation stratégique
Même si le phénomène GLP-1 est encore naissant en France, il s’installe durablement à l’échelle mondiale et atteindra progressivement tous les marchés, en particulier dans les segments urbains, premium ou santé.
Selon moi, les marques agroalimentaire françaises ont tout intérêt à agir dès maintenant en :
Observant les signaux faibles dans leurs panels consommateurs
Travaillant la reformulation (réduction sucre, gras, calories) et la diversification
Testant de nouveaux formats adaptés aux petites portions et à une consommation plus fonctionnelle
Développant des argumentaires santé crédibles, y compris pour des produits plaisir revisités
La transition vers une alimentation post-GLP-1 représente moins une menace qu’un accélérateur de transformation.
Les marques françaises les plus agiles, innovantes et connectées aux usages réels peuvent non seulement protéger leur base, mais aussi conquérir de nouveaux territoires, au croisement de la santé, du plaisir et de la responsabilité.